Depuis quelques jours, un nouveau phénomène fait le buzz sur TikTok : le Tanaland. Derrière ce nom intrigant se cache un pays fictif 100% féminin, imaginé en réponse à l’utilisation du mot « tana » comme insulte sexiste envers les femmes sur les réseaux sociaux. Si l’idée peut prêter à sourire, elle soulève aussi des questions sur la tournure que prend parfois le combat féministe en ligne.
Le Tanaland, une réponse ironique à la misogynie
Tout est parti de vidéos TikTok dans lesquelles des hommes utilisaient le terme « une tana » pour dénigrer les femmes de façon sexiste. Face à cette nouvelle insulte, certaines utilisatrices ont décidé de répliquer avec humour et second degré en créant le Tanaland. Ce pays imaginaire arbore fièrement un drapeau rose Barbie et ne serait peuplé que de femmes. Sa capitale Tana City serait dirigée par un gouvernement d’influenceuses engagées contre la misogynie.
Au-delà de la blague, l’idée du Tanaland révèle un réel ras-le-bol face aux comportements sexistes qui persistent en ligne. En se réappropriant de façon positive et ironique une insulte, ces femmes cherchent à dénoncer la « haine des hommes » et la masculinité toxique dont elles s’estiment victimes au quotidien sur les réseaux sociaux. Une manière aussi de rêver à un safe space bienveillant où elles pourraient s’exprimer sans craindre les commentaires dégradants.
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Gare aux dérives misogynes… Ou misandres ?
Soyons clairs : il est totalement légitime de vouloir créer des espaces pour dénoncer les violences sexistes et lutter contre la misogynie. Là où le bât blesse avec le concept de Tanaland, c’est qu’en imaginant un monde sans homme, il véhicule en creux l’idée que tous les hommes seraient misogynes. Un raccourci pour le moins dangereux.
Lutter contre le sexisme par plus de sexisme n’a jamais fait avancer le schmilblick. On peut comprendre la colère et l’agacement des femmes face aux insultes misogynes récurrentes en ligne. Mais est-ce une raison pour tomber dans la misandrie et rêver d’exclure tout un genre ? Certains y verront une preuve de plus que le féminisme est en train de virer « anti-hommes ». Un argument bien connu des masculinistes pour discréditer la lutte pour l’égalité.
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Le Tanaland, coup de com’ ou vrai message politique ?
Derrière son aspect potache et coloré, le Tanaland a le mérite de mettre sur le devant de la scène la persistance des comportements sexistes sur les réseaux sociaux. Cependant, en jouant sur une opposition frontale hommes/femmes, ce concept fictif risque d’alimenter plus de tensions et d’incompréhensions que de faire avancer le débat.
Certains y verront le symbole d’un féminisme 2.0 qui aurait perdu de vue ses valeurs d’égalité et d’inclusion pour verser dans l’entre-soi et le rejet de l’autre. D’autres salueront l’inventivité de ces « néo féministes » qui utilisent l’arme de l’humour et de la dérision pour faire passer leurs messages. Selon son créateur, le Tanaland serait d’ailleurs ouvert aux hommes qui soutiennent la cause féministe…
Une chose est sûre, le buzz du Tanaland aura au moins eu le mérite de relancer (une fois de plus) le débat sur la place des femmes dans l’espace numérique. Espérons que derrière la provocation et les clivages, le dialogue reste ouvert pour construire un Internet plus respectueux et inclusif. Les hommes comme les femmes ont à y gagner.