La société malgache, comme tant d’autres, traverse une période de mutation face à la question de l’homosexualité. Les débats sont souvent enflammés, avec d’un côté ceux qui prônent l’acceptation, et de l’autre, ceux qui, aveuglés par des préjugés, rejettent catégoriquement l’idée que les LGBT puissent coexister pacifiquement dans le cadre du soatoavina malagasy. Mais posons-nous la vraie question : l’homosexualité remet-elle réellement en cause ces valeurs malgaches fondamentales ? Ou bien assistons-nous à une déformation orchestrée par ceux qui se cachent derrière une homophobie délibérée pour justifier l’exclusion ?

 

Le soatoavina malagasy : une construction précoloniale

Avant de statuer sur la compatibilité de l’homosexualité avec le soatoavina malagasy, il convient de rappeler que ce dernier est bien plus ancien que l’arrivée des religions importées à Madagascar. Contrairement à ce que beaucoup pensent, ces valeurs n’ont rien à voir avec les doctrines religieuses apportées par les missionnaires anglais ou les colons. Le soatoavina malagasy s’est construit autour de principes de solidarité, de respect des ancêtres et du fihavanana, cette unité communautaire qui prône le vivre ensemble et la tolérance.

Au cœur de ces valeurs se trouve le respect des individus dans leur diversité. La hiérarchie sociale malgache, autrefois incarnée par les raiamaandreny (aînés), n’a jamais eu pour objectif de surveiller la vie privée des gens ou de réguler leur orientation sexuelle. La cohésion sociale, fondement même du soatoavina malagasy, n’a jamais exigé la conformité des individus à une norme sexuelle unique. Dès lors, pourquoi aujourd’hui, certains s’arrogent-ils le droit de décréter que les homosexuels ou les homos sont une menace pour la société malgache ?

 

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La vie privée, sanctuaire inviolable dans la culture malgache

Le respect de la vie privée a toujours été un pilier de la culture malgache. Les ancêtres, qui jouent un rôle prééminent dans le soatoavina malagasy, ne s’intéressent pas à la vie intime des individus tant que ceux-ci respectent leurs obligations familiales et communautaires. En d’autres termes, l’orientation sexuelle d’un gay ou d’un homo ne concerne ni la communauté, ni les ancêtres. Les rites et les croyances qui entourent le respect des ancêtres visent à maintenir la paix et l’harmonie, non à régenter les choix personnels des membres de la communauté.

Pourquoi alors certains voudraient imposer leurs préjugés homophobes sous prétexte de protéger le soatoavina malagasy ? Une telle attitude est une instrumentalisation de ces valeurs, souvent à des fins de domination sociale ou religieuse. Dans une société où le fihavanana et le vivre ensemble sont des fondements essentiels, la marginalisation des LGBT sous couvert de protection des valeurs est non seulement infondée, mais elle va à l’encontre de l’essence même de ces valeurs.

 

L’arrivée des religions et la manipulation des valeurs

Avec l’arrivée des missionnaires, la société malgache a été soumise à une tentative de transformation radicale de ses valeurs. Le christianisme, avec ses normes rigides sur la sexualité, a cherché à redéfinir ce qui était acceptable ou non dans la société. Cela a semé la confusion, certains commençant à associer les valeurs importées à celles qui avaient déjà structuré la vie malgache depuis des siècles. Pourtant, il est essentiel de se souvenir que les valeurs du soatoavina malagasy sont antérieures à ces influences étrangères.

En tentant d’introduire des notions de péché ou d’immoralité en lien avec l’homosexualité, ces influences extérieures ont corrompu la perception de l’identité sexuelle dans la société malgache. Mais en réalité, le soatoavina malagasy n’a jamais dicté une norme en matière de sexualité, car cela relève strictement de la sphère privée. Les homos et les gay n’ont jamais été perçus comme une menace pour la société avant l’arrivée de ces doctrines importées.

 

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Homophobie et déformation du soatoavina malagasy

Il est impératif de comprendre que l’homophobie, telle qu’elle est exprimée aujourd’hui à Madagascar, est le résultat d’une appropriation malveillante des valeurs traditionnelles. Les opposants à la communauté LGBT tentent de dissimuler leur haine derrière une fausse interprétation des valeurs culturelles. Pourtant, si l’on retourne aux fondements mêmes du soatoavina malagasy, on réalise qu’il prône l’inclusion et le respect des différences.

Dans la société malgache, le respect des ancêtres est central, mais ce respect ne se traduit pas par l’imposition d’une norme de vie ou d’une orientation sexuelle. Ce qui compte, c’est l’harmonie dans la communauté et la famille. Tant que les membres de la communauté gay à Madagascar respectent les devoirs envers leurs proches et les ancêtres, leur orientation sexuelle ne devrait en aucun cas être un problème.

 

Vers un soatoavina malagasy inclusif

À l’heure où les débats sur les droits des LGBT s’intensifient à travers le monde, Madagascar ne peut se permettre de rester en arrière, figé dans des conceptions archaïques. Le soatoavina malagasy a toujours été un système de valeurs vivant, capable de s’adapter aux réalités contemporaines. Plutôt que d’exclure, il doit évoluer vers une plus grande tolérance et compréhension, en respectant la vie privée de chacun.

Les homosexuels et les gay ont toujours existé à Madagascar, même si leur présence est devenue plus visible aujourd’hui grâce aux médias et aux réseaux sociaux. Les Malgaches doivent se rappeler que la cohésion sociale repose sur le respect mutuel et non sur la condamnation des différences. Le soatoavina malagasy n’a jamais exigé la conformité absolue aux choix de vie des uns ou des autres, et ce n’est pas aujourd’hui que cela devrait changer.

 

Un appel à la tolérance

Il est temps pour Madagascar de redécouvrir l’essence véritable du soatoavina malagasy. L’homosexualité, en tant que réalité de la vie privée, ne menace en aucun cas la cohésion sociale ou les valeurs malgaches. Ceux qui prétendent le contraire ne font qu’instrumentaliser ces valeurs pour justifier leur homophobie.

Le soatoavina malagasy, ancré dans le fihavanana et le vivre ensemble, est avant tout un appel au respect et à la solidarité. Si la société malgache souhaite vraiment protéger ses valeurs, elle doit se tourner vers une inclusion totale de ses membres, quelle que soit leur orientation sexuelle.

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