Le contexte social est explosif à Madagascar. Coupures d’eau et d’électricité à répétition, pauvreté galopante, gronde sociale… Et dans quelques semaines, les élections municipales qui feront office de test pour la popularité du régime. C’est dans ce contexte qu’Andry Rajoelina, tel un sauveur providentiel, a débarqué hier soir sur le plateau flambant neuf de la TVM. Objectif affiché : rassurer les Malgaches sur sa capacité à résoudre leurs problèmes quotidiens. Objectif officieux : redorer son blason avant ce scrutin crucial.
Un constat lucide de la situation catastrophique du pays… qui sonne creux
Drapé dans son costume présidentiel, Andry Rajoelina a déroulé un diagnostic sans concession de la situation du pays. Oui, les Malgaches souffrent. Oui, les coupures d’eau et d’électricité empoisonnent leur quotidien. Oui, la pauvreté atteint des niveaux inédits. Dont acte. On appréciera cet accès de lucidité chez un Président parfois déconnecté des réalités.
Mais ce constat, Andry Rajoelina aurait dû le faire bien plus tôt. À l’heure du bilan, impossible pour lui de se dédouaner de ses responsabilités. Cette crise aux multiples visages, c’est aussi le fruit amer de plusieurs années de mandat chaotiques. Des politiques économiques défaillantes, des projets d’infrastructures jamais réalisés, une gouvernance erratique, une corruption endémique… Voilà le lourd passif de l’État malgache. La posture de commentateur lucide du Président malgache est donc bien mal venue.
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Des solutions « pansements » qui ne résolvent rien sur le fond
Face caméra, Andry Rajoelina a détaillé tout un arsenal de mesures censées répondre à l’urgence sociale. Des citernes d’eau pour approvisionner les quartiers, des groupes électrogènes pour limiter les délestages, et des forages à tout va… Le tout à coup de milliards d’ariary.
Le hic, c’est qu’on a déjà entendu cette rengaine. Chaque crise est l’occasion pour Andry Rajoelina de ressortir ses vieilles recettes et de recycler ses promesses poussiéreuses. Tana Water III pour l’eau, l’énergie solaire pour l’électricité… Cela fait des années que ces projets sont dans les tuyaux sans jamais se concrétiser.
Surtout, ces mesurettes occultent l’essentiel : l’absence d’une vision de long terme et d’une politique de réformes structurelles. Elles soignent les symptômes sans jamais s’attaquer à la racine des maux. Andry Rajoelina semble naviguer à vue, sans cap ni boussole pour redresser le pays.
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Une opération de communication grossière en vue des municipales
Pourquoi ce regain d’empathie soudain d’Andry Rajoelina envers les populations d’Antananarivo ? Pourquoi cette débauche de promesses spécifiquement ciblées sur la capitale ? La réponse tient en un mot : élections.
Le pouvoir craint plus que tout de voir la mairie d’Antananarivo, ce bastion stratégique, lui échapper au profit des opposants. Andry Rajoelina, l’ancien Maire, joue donc son va-tout pour redorer son image auprès des Tananariviens. Et il n’a pas lésiné sur les moyens : plan « Tsimbina » et aides sociales de dernière minute, effets d’annonce et langue de bois… Un véritable plan de « com’ » aux frais du contribuable.
Mais les Malgaches ne sont plus dupes. Tant d’années de désillusions ont rendu leur jugement implacable. Les sourires de façade et les promesses en l’air du Président Andry Rajoelina ne suffiront plus. Ce qu’attendent les habitants de la capitale comme ceux du reste du pays, ce sont des actes. Des résultats. Un vrai changement.
Ce passage sur la TVM aura au moins eu le mérite de révéler un Président Andry Rajoelina affaibli, aux abois et prêt à toutes les contorsions pour sauver son pouvoir. Mais son bilan accablant, lui, est dans toutes les têtes. Et il risque fort de lui coûter très cher dans les urnes. Les Malgaches aspirent à tourner la page de ce mandat calamiteux.